Des pénuries croissantes et un gouvernement en échec
Après cinq mois d’enquête approfondie et plus de cinquante auditions d’acteurs de la santé, le Sénat français a rendu son rapport sur les pénuries de médicaments dans le pays. Les conclusions sont sans appel : la situation est « alarmante » et le gouvernement n’est pas à la hauteur pour y remédier. Laurence Cohen, sénatrice et rapporteure de la commission d’enquête, qualifie même la politique du médicament en France de « faillite ».
Une crise exacerbée et des prévisions manquées
La commission d’enquête a recueilli des témoignages et des données démontrant que les pénuries de médicaments s’aggravent de manière inquiétante. En 2018, on dénombrait 700 signalements de ruptures de stock, tandis que cet hiver, ce chiffre a explosé pour atteindre plus de 3 700 cas. Cet essor sans précédent met en évidence le manque d’anticipation des autorités et des industriels, qui fonctionnent en flux tendu. La triple épidémie de Covid, de grippe et de bronchiolite a accentué la crise.
Les causes profondes des pénuries
Plusieurs facteurs contribuent aux pénuries de médicaments en France. Tout d’abord, la production sur le territoire national est insuffisante. La plupart des principes actifs sont désormais fabriqués en Asie, avec une sous-traitance croissante. De plus, les médicaments sont souvent considérés comme de simples marchandises, avec une priorité donnée aux produits innovants et une négligence envers les autres médicaments moins rentables, tels que l’amoxicilline ou le paracétamol. Enfin, l’absence de coordination et de gestion adéquate des pénuries est un autre facteur déterminant.
Des pistes de solutions proposées
Le rapport du Sénat présente 36 pistes de réflexion pour remédier à cette problématique. Parmi les propositions figurent l’établissement d’une liste de médicaments essentiels, la relocalisation de la production en Europe avec des prix régulés et des normes d’étiquetage uniformisées, le contrôle des stocks des industriels avec des sanctions dissuasives pour les grandes entreprises pharmaceutiques, et surtout la création d’un secrétariat général au médicament. Il est désormais urgent, selon le rapport, de prendre en charge cette question de manière politique et transparente.