Thomas Legrand : un appel à une mesure objective des manifestations
En 2017, lors de diverses mobilisations, la question du comptage des manifestants a pris une tournure nouvelle. Après un rassemblement organisé un jeudi de cette année-là, plusieurs médias ont décidé de publier leur propre estimation du nombre de participants, rompant avec la pratique traditionnelle qui opposait généralement les chiffres avancés par les organisateurs et ceux des autorités.
Selon un article de Libération à l’époque, une vingtaine de rédactions s’étaient regroupées pour cette opération. Elles avaient confié la tâche à l’institut Occurrence. Cette démarche faisait suite à un billet publié le 25 septembre 2017 par Thomas Legrand, dans lequel il exprimait déjà ses préoccupations à ce sujet.
Une pratique déplorée par Thomas Legrand
Thomas Legrand dénonçait la tendance à ne relayer que les chiffres donnés par les organisateurs et la police, ce qu’il considérait comme une habitude déplorable. Il expliquait que cette pratique laissait le public face à une fourchette de chiffres peu informative, voire risible. Par exemple, lors d’un rassemblement des Insoumis, les organisateurs avaient avancé le chiffre de 150 000 manifestants, tandis que la police en comptabilisait seulement 30 000. Deux journalistes de Marianne avaient alors réalisé un décompte plus précis, estimant la foule à environ 57 000 personnes.
Pour Thomas Legrand, il ne s’agissait pas d’une question d’opinion, mais d’un fait. Il dénonçait le fait que se contenter de publier ces deux chiffres officiels entretenait l’illusion qu’il existerait plusieurs vérités, comme si celles des organisateurs et de la police avaient une même valeur. Selon lui, cette neutralité apparente masquait une désinformation, alors même que des outils techniques existaient pour une évaluation plus précise de l’ampleur d’une manifestation.
Une proposition pour une évaluation objective
Thomas Legrand plaidait pour une coopération entre les rédactions afin de produire un troisième chiffre, plus indépendant et objectif. Il rappelait que Mediapart et France 2 avaient déjà tenté cette approche dans le passé, obtenant des estimations parfois inférieures, parfois proches de celles de la préfecture. De son côté, Libération analysait les méthodes de comptage des syndicats et des autorités, en privilégiant désormais le chiffre policier.
Il insistait sur le fait qu’il était inacceptable de continuer à présenter un écart de un à cinq entre les chiffres officiels comme une vérité. Selon lui, la démocratie française repose aussi sur la voix de la rue. Il était donc crucial d’établir une méthode permettant de mesurer objectivement l’ampleur des manifestations. À cette époque, plusieurs directeurs de rédaction envisageaient la mise en place d’un protocole commun pour aboutir à un chiffre fiable, issu de la presse.
