Une proposition de loi pour rendre imprescriptibles les crimes sexuels sur mineurs
Le 19 novembre, la sénatrice centriste Annick Billon a déposé une proposition de loi visant à rendre imprescriptibles les crimes sexuels commis sur des mineurs. Cette initiative est soutenue par l’association Face à l’inceste, qui a participé à son élaboration. Le même jour, l’association lance une vaste campagne de communication pour faire connaître cette proposition.
Un combat de longue date contre l’inceste
Depuis vingt-cinq ans, l’association Face à l’inceste lutte contre les violences sexuelles sur les enfants. Selon Solène Podevin-Favre, sa présidente, des mois de travail ont été menés avec l’équipe de la sénatrice pour élaborer cette loi. Elle insiste aussi sur le lancement d’une campagne avec 18 autres associations pour sensibiliser le public.
Les enjeux de l’imprescriptibilité
La mesure principale proposée consiste à supprimer la prescription pour les crimes sexuels sur mineurs. Selon Solène Podevin-Favre, cela permettrait aux victimes d’avoir toujours la possibilité de témoigner, quel que soit le temps écoulé. Actuellement, le délai de prescription est de 30 ans à partir de la majorité de la victime, ce qui lui laisse jusqu’à 48 ans pour parler.
La difficulté à parler pour les victimes
Face à l’inceste, qui concerne en moyenne trois enfants par classe, la difficulté à s’exprimer est grande. La présidente de l’association rappelle que 50 % des victimes souffrent d’amnésie dissociative, et 40 % dans d’autres cas de crimes sexuels. La reprise de conscience peut intervenir entre 17 et 20 ans, ce qui retarde souvent la parole des victimes.
Cette amnésie dissociative, qui permet de réduire la douleur immédiate, sert aussi à préserver la famille pour l’enfant. La mise en place de l’imprescriptibilité permettrait de respecter le processus de reconstruction des victimes, qui souvent n’ont pas la capacité de parler plus tôt. La parole peut être encore plus difficile à sortir dans le cas de l’inceste, car elle peut entraîner la rupture de la famille.
Une nouvelle définition de l’inceste
La proposition de loi souhaite aussi revoir la définition de l’inceste. Historiquement, cette infraction était inscrite dans le Code pénal de l’Ancien Régime, puis supprimée lors de la Révolution. En 2016, l’inceste a été réintroduit dans le Code pénal. En 2021, Annick Billon avait proposé un article spécifique, mais il était dispersé en plusieurs textes.
Le but de la nouvelle proposition est de rassembler ces dispositions en un seul article. L’inceste serait ainsi défini comme un crime sexuel commis par un membre de la famille contre un mineur, avec une attention particulière à la dimension familiale qui peut enfermer l’enfant.
Inclure les cousins germains dans la définition
La proposition de loi souhaite également étendre la définition de l’inceste aux cousins germains. Actuellement, une agression sexuelle sur un enfant par un cousin germain n’est pas considérée comme incestueuse. Pourtant, selon Solène Podevin-Favre, un cinquième des agresseurs sur mineur sont des cousins germains.
Elle explique que la notion d’autorité dans la loi limite souvent l’inclusion de certains cas. La différence vient aussi du fait qu’un mariage entre cousins est autorisé dans le droit civil, alors qu’un viol reste un crime. La présidente rappelle que cette distinction ne doit pas faire obstacle à la protection de l’enfant.
