
Crédits gelés, effectifs réduits, année blanche… Les sénateurs ne font pas dans la demi-mesure pour redresser les comptes publics.
Un rapport sous haute tension
La situation des finances publiques inquiète, et le Sénat n’a pas attendu la présentation du plan gouvernemental pour dévoiler ses propres solutions. Gérard Larcher, président du Sénat, s’est déplacé à Matignon pour remettre un rapport explosif au Premier ministre. Objectif affiché : retrouver une trajectoire soutenable, et vite.
“Il y a une voie, elle est exigeante, mais il faut la saisir maintenant,” martèle Jean-François Husson, rapporteur général du budget. Les chiffres donnent le ton : le Sénat vise entre 30 et 50 milliards d’euros d’économies, principalement par des coupes franches dans la dépense publique.
Des coupes dans les budgets… et les effectifs
Parmi les propositions phare, un retour à une politique bien connue sous Nicolas Sarkozy : ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. L’État pourrait ainsi économiser près de 500 millions d’euros l’an prochain, estiment les sénateurs. Ils plaident aussi pour une harmonisation des jours de carence entre public et privé, passant d’un à trois jours pour les fonctionnaires.
Autre piste : geler en valeur les crédits de l’État, en excluant la défense, la charge de la dette et la contribution à l’Union européenne. Ce gel, combiné à une baisse supplémentaire d’un pourcent des autres crédits, rapporterait plus de 10 milliards d’euros dès 2026.
Année blanche sur les prestations sociales et gel du barème fiscal
La proposition la plus sensible reste celle de l’“année blanche” sur les prestations sociales : pas de revalorisation des retraites ni des aides sociales en 2026. Une mesure qui, à elle seule, permettrait d’économiser 5 milliards d’euros, dont 3 milliards rien que sur les retraites. Un geste fort, qui ne manquera pas de susciter le débat.
Côté fiscalité, pas de hausse d’impôts prévue – mais les sénateurs n’excluent pas de geler le barème de l’impôt sur le revenu si les économies prévues ne suffisaient pas. Ils misent également sur une lutte renforcée contre la fraude, en particulier le dispositif “CumCum”, pour rapporter 1,5 à 2 milliards supplémentaires.
Les collectivités et la Sécurité sociale également dans le viseur
Si les collectivités territoriales ne sont pas les principales responsables de la dette, selon les sénateurs, elles devront malgré tout contribuer à l’effort, à hauteur de 2 milliards d’euros. La rationalisation des compétences entre État et collectivités pourrait aussi générer jusqu’à 7,5 milliards d’euros d’économies sur deux ans.
La Sécurité sociale n’est pas en reste : le Sénat vise 10 milliards d’économies en 2026, avec notamment des mesures ciblant les affections de longue durée, les médicaments et les dispositifs médicaux. Les assureurs santé pourraient également se voir confier davantage de missions de prévention.
Un plan d’économies inédit… mais pas encore tranché
Les mesures proposées par le Sénat ne sont pas encore arrêtées. Elisabeth Doineau, rapporteure de la commission des Affaires sociales, le rappelle : “Ce ne sont pas des choix définitifs, mais des pistes à mettre sur la table.” Reste à voir ce que le gouvernement retiendra dans son propre plan d’action, attendu d’ici la mi-juillet.
En attendant, l’ampleur des sacrifices envisagés donne la mesure de la crise. Chacun sera mis à contribution, promettent les sénateurs, avec l’espoir d’éviter une nouvelle envolée de la dette… à condition d’avoir le courage politique d’aller au bout.