
Vers une chasse aux fraudeurs encore plus poussée ?
La lutte contre la fraude à l’Assurance maladie continue de faire parler d’elle. Après avoir stoppé 628 millions d’euros de fraudes en 2024 – un record historique –, la Sécu souhaite aller encore plus loin. Mais sa nouvelle idée ne fait pas l’unanimité, loin de là, et le Conseil constitutionnel vient de lui rappeler qu’il y a des limites à ne pas franchir.
Une coopération renforcée avec les complémentaires santé ?
C’est l’un des axes forts du dernier rapport de la Caisse nationale d’Assurance maladie (Cnam), publié ce 24 juin. L’idée : mieux partager les informations entre la Sécu et les complémentaires santé pour détecter plus vite les abus et stopper les remboursements injustifiés. En clair, la Cnam voudrait croiser ses fichiers avec ceux des mutuelles, assureurs santé et institutions de prévoyance, dès qu’une suspicion de fraude apparaît.
Problème : cette mesure avait déjà été intégrée au projet de budget de la Sécu pour 2025… avant d’être retoquée par le Conseil constitutionnel, qui a jugé qu’elle n’avait rien à faire dans une loi budgétaire.
Une proposition de loi dans les tuyaux
Pas découragés, certains députés relancent le débat. Le député Modem Cyrille Isaac-Sibille a déposé une nouvelle proposition de loi le 13 mai, qui pourrait être discutée cet automne. Son objectif ? Faciliter enfin ces échanges entre l’Assurance maladie et les complémentaires, notamment lorsqu’une plainte pour fraude est déposée.
Mais attention : pour ne pas violer le secret médical, seules les infos “strictement nécessaires” pour identifier le fraudeur seraient partagées. Reste à voir si cette version convaincra le Conseil constitutionnel et les parlementaires.
Des acteurs du secteur plutôt favorables, mais prudents
Les principales fédérations du secteur (Mutualité Française, France Assureurs, CTIP) sont prêtes à coopérer, mais elles réclament un texte législatif clair pour encadrer l’utilisation de ces données de santé. Une condition jugée indispensable pour respecter la confidentialité tout en luttant efficacement contre les abus.
2024 : une année record pour la détection des fraudes
Les derniers chiffres sont impressionnants : 628 millions d’euros de fraudes détectées et stoppées en 2024, soit une hausse de 34 % par rapport à 2023. Un record, selon la Cnam, qui note que :
- Plus de la moitié des fraudes sont commises par des assurés… mais elles ne représentent que 18 % des montants.
- Ce sont les fraudes des professionnels de santé qui coûtent le plus cher : elles pèsent pour 62 % du préjudice, même si elles sont moins nombreuses.
Ce qui pourrait changer pour les assurés et les pros de santé
Si la nouvelle loi passe, attendez-vous à plus de contrôles croisés entre la Sécu et les complémentaires. L’objectif : que chaque euro de remboursement soit justifié, pour éviter que la collectivité ne paie pour quelques fraudeurs. Mais la bataille politique et juridique ne fait que commencer.