
Indemnités journalières en plein boom : faut-il s’inquiéter ?
Chaque été, c’est le même refrain : l’Assurance maladie tire la sonnette d’alarme sur la hausse de ses dépenses, surtout à l’approche de l’examen du budget de la Sécurité sociale. Cette année, le constat est sans appel. Les arrêts maladie, eux, sont littéralement en train d’exploser. Entre 2019 et 2023, les dépenses liées aux indemnités journalières ont bondi de près de 28 %. Résultat : 10,2 milliards d’euros versés rien qu’en 2023 pour compenser les arrêts de travail, dont la majorité pour des arrêts de plus de huit jours.
Pourquoi une telle hausse des arrêts maladie ?
- Des salariés plus nombreux et plus âgés.
- Des salaires moyens en hausse.
- Mais surtout, plus d’arrêts, plus fréquents, et souvent plus longs.
La Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) pointe également du doigt le fait qu’un petit nombre de médecins délivre une grande partie des arrêts de longue durée.
Limiter la durée des arrêts, une solution sur la table
Pour tenter de freiner la dérive, la Cnam propose une mesure choc : limiter les arrêts maladie prescrits en ville à 15 jours maximum, et à un mois en cas d’hospitalisation. Au-delà, chaque prolongation devrait passer par une nouvelle consultation médicale, avec une limite de deux mois pour les arrêts renouvelés. “On observe trop d’arrêts prescrits pour des durées excessives, parfois pour des troubles mineurs qui devraient plutôt faire l’objet d’un suivi régulier”, explique Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam.
À ce jour, aucune règle n’encadre strictement la durée des arrêts maladie, mais la tendance est claire : il est temps de serrer la vis.
Lutter contre l’absentéisme : bonus, malus et télétravail au programme
Le rapport ne s’arrête pas là. L’Assurance maladie s’inquiète aussi de l’absentéisme croissant au travail, lié à la fois à des problèmes de santé, mais aussi à des facteurs comme le mal-être, le manque de reconnaissance, ou le vieillissement de la population active.
Parmi les pistes évoquées :
- Un système de bonus/malus pour les entreprises : celles qui parviennent à réduire l’absentéisme pourraient recevoir un bonus, alors que celles qui restent en dehors des clous pourraient être sanctionnées.
- Miser sur le télétravail : pour certains salariés en arrêt, continuer à travailler à distance pourrait être une alternative à l’arrêt maladie classique, si leur état le permet.
“Certaines pathologies ou accidents empêchent de se déplacer mais n’empêchent pas de travailler depuis chez soi. Autant l’encourager, plutôt que de verser des indemnités journalières”, analyse la Cnam.
Vers de nouvelles règles de prise en charge ?
Autre proposition : transférer le financement des sept premiers jours d’arrêt maladie aux entreprises, avec l’instauration d’une journée de carence obligatoire pour décourager les abus. Aujourd’hui, la Sécu prend le relais après trois jours d’absence – parfois couverts par l’employeur, selon les accords d’entreprise.
Un système sous tension, à la recherche d’équilibre
Pour l’Assurance maladie, il y a urgence. Si rien ne change, le déficit pourrait doubler d’ici 2030, passant de 16 à 41 milliards d’euros. Limiter la durée des arrêts, mieux cibler les prescriptions et encourager le télétravail sont donc des pistes sérieusement envisagées pour remettre le système à flot… et tenter de contenir une dérive qui semble, pour l’instant, difficile à enrayer.
À suivre dès la rentrée : le débat parlementaire promet d’être animé autour de ces propositions qui touchent à la fois à la santé, au monde du travail et à l’équilibre de notre protection sociale.