
C’est un vote qui a fait trembler les bancs de l’Assemblée. Ce mardi, contre toute attente, les députés ont adopté à une courte majorité (275 voix contre 252) le projet de loi de simplification, un texte qui devait à l’origine faciliter la vie des entreprises, mais qui s’est transformé en vrai feuilleton politique.
Des débats houleux et une majorité en désordre
Le projet, déjà passé sans encombre au Sénat, a connu un parcours bien plus chaotique à l’Assemblée. Les débats se sont enflammés, en particulier autour de la suppression des Zones à Faibles Émissions (ZFE), ces périmètres instaurés en 2019 pour limiter la circulation des véhicules polluants. Défendues par les Républicains et le Rassemblement national, avec l’appui inattendu de la France Insoumise, ces mesures n’ont pas résisté au rouleau compresseur de l’opposition.
Gabriel Attal, pourtant à la manœuvre pour tenter de faire barrage au texte, a vu une partie de son propre camp lui tourner le dos. Sur les 86 députés de son groupe, 64 ont voté contre, 14 se sont abstenus… et 8 ont même approuvé la réforme. Résultat : consigne de vote ignorée, opération d’opposition ratée, et un malaise évident chez les macronistes. “C’est une déculottée pour Attal”, glisse un député sous couvert d’anonymat, en pointant un leadership fragilisé.
ZFE et ZAN, deux mesures environnementales sacrifiées
La loi supprime donc les fameuses ZFE, mais pas seulement. L’objectif du “zéro artificialisation nette” (ZAN), destiné à limiter la bétonisation et à protéger les terres agricoles, est aussi vidé de sa substance. “On a jeté par-dessus bord des années de politique environnementale”, regrette la députée Marie Lebec, qui a pourtant défendu la version sénatoriale du texte.
Du côté de l’opposition, le ton est tout autre. “Nous avons eu des victoires et des résultats”, jubile le député RN Matthias Renault. Même satisfaction chez Les Républicains, qui soulignent avoir entendu “la voix des Français”, lassés selon eux des contraintes écologiques jugées trop lourdes.
Une loi fourre-tout… et un avenir incertain
Certains élus de la majorité n’ont pas caché leur malaise. Pour Guillaume Kasbarian, ancien ministre, “le texte n’est pas parfait”, mais il aurait eu du mal à voter contre une loi défendue depuis si longtemps par son propre gouvernement. D’autres, comme la députée Constance Le Grip, assument leur choix : “Il y a plus d’avancées que de points bloquants. Ce serait absurde de tout rejeter.”
La gauche, elle, dénonce un recul écologique. “Vous faites sauter toutes les digues et toutes les protections du vivant”, a fustigé la députée LFI Anne Stambach-Terrenoir.
Et maintenant ?
L’avenir du texte reste encore flou. La version adoptée à l’Assemblée diffère largement de celle du Sénat : une commission mixte paritaire doit maintenant tenter de trouver un compromis. Mais rien n’est joué. Un ministre avoue en coulisses : “Je ne crois pas que ce texte aboutira. On marche sur la tête, tout le monde s’emmêle, personne ne comprend plus rien…”
Une chose est sûre : la simplification annoncée n’aura jamais paru aussi complexe à mettre en œuvre.