
Un petit colis à bas prix… mais un coût bien réel pour l’Union européenne
C’est peut-être la fin du shopping à prix cassés sans contrepartie. La Commission européenne propose d’instaurer un frais fixe de 2 euros pour chaque petit colis en provenance de pays hors UE, avec une cible claire : les plateformes chinoises comme Shein, Temu ou AliExpress, qui inondent le marché européen avec des produits souvent vendus à quelques euros à peine.
Pourquoi maintenant ? Parce que les douanes saturent
Le constat est sans appel : près de 4,6 milliards de colis de faible valeur, c’est-à-dire en dessous de 150 € ,ont été expédiés vers l’Union européenne en 2024. Autrement dit, 145 colis par seconde, et plus de 90 % viennent de Chine.
Ce volume est tel que les services douaniers européens n’arrivent plus à suivre. Le traitement, la vérification, le contrôle sanitaire et sécuritaire de ces colis génèrent une charge de travail colossale, selon le commissaire européen au Commerce, Maros Sefcovic. D’où cette idée de faire payer 2 euros par colis à la plateforme d’origine, pour soulager les douanes — et envoyer un signal politique.
“Ce n’est pas une taxe, c’est une participation aux frais”
C’est en tout cas comme ça que Bruxelles veut présenter la mesure. Pas une taxe, mais un « frais de gestion », censé couvrir les coûts des contrôles douaniers de plus en plus nombreux. Le but ? Que les géants du e-commerce qui profitent du système participent un minimum au fonctionnement de celui-ci.
Ces frais de 2 euros par colis s’ajouteraient donc aux coûts logistiques des plateformes concernées. Et même si ce n’est pas l’acheteur qui paiera directement, les prix ultra-compétitifs pourraient bien en prendre un coup.
La fin d’un régime trop avantageux ?
Depuis 2010, les colis d’une valeur inférieure à 150 euros bénéficient d’une exonération de droits de douane. Résultat : une robe à 9 €, un gadget à 3 €, une paire de boucles d’oreilles à 1,50 € arrivent sans taxe ni contrôle poussé. C’est ce régime que la Commission européenne veut revoir de fond en comble.
En février déjà, Bruxelles plaidait pour la suppression de cette exonération, alertant sur les risques pour la santé, la sécurité des consommateurs… et la planète. Parce qu’avec ce flux incessant de colis, ce sont aussi les émissions carbone et les déchets d’emballage qui explosent.
La France applaudit la mesure, les PME soufflent un peu
C’est Paris qui avait mis la pression en premier, réclamant dès avril l’instauration de frais obligatoires sur chaque colis entrant. Et pour cause : 800 millions de colis de ce type ont été livrés en France en 2024. De quoi faire frémir les commerçants locaux, qui eux paient taxes, TVA, et respectent les normes européennes.
Les petits commerces et les PME, qui dénoncent depuis longtemps une concurrence déloyale, voient donc d’un bon œil ce tournant. Pour eux, c’est aussi une manière de rééquilibrer un jeu devenu injuste : celui où les plateformes étrangères vendent moins cher simplement parce qu’elles contournent les règles.
Et maintenant ?
Ce n’est encore qu’une proposition, mais elle arrive dans un contexte politique tendu, où l’Europe veut montrer qu’elle reprend la main sur ses règles commerciales. Les discussions vont se poursuivre, notamment sur la manière dont ce frais sera appliqué — et si les plateformes chinoises le répercuteront ou non sur leurs prix.
En tout cas, une chose est claire : les colis à bas coût ne sont plus intouchables, et le temps du tout-gratuit pour les géants du e-commerce semble toucher à sa fin.