
Appels intempestifs, promos bidon, et CPF fantômes : bientôt la fin de l’enfer ?
Ils appellent toujours quand on est à table, au travail ou au volant. Les démarcheurs téléphoniques, on ne les présente plus : offres de pompes à chaleur, formations CPF, fenêtres à triple vitrage… Ils insistent, reviennent et raccrochent rarement avant de vous avoir fait soupirer. Mais une nouvelle loi votée début mai pourrait bien changer radicalement les règles du jeu à partir de l’été 2026. Et cette fois, on ne parle pas juste d’amendes ou de restrictions horaires : le principe même du démarchage est remis en question.
Une petite révolution dans votre téléphone
Le cœur de cette réforme ? Renverser la logique actuelle. Jusqu’ici, les entreprises pouvaient appeler librement les particuliers, à moins que ces derniers n’aient fait la démarche de s’inscrire sur Bloctel pour refuser les appels. Mais à partir du 11 août 2026, ce sera l’inverse : seules les personnes ayant donné leur accord explicite pourront être démarchées. Plus de « non, je ne suis pas intéressé », mais une règle simple : pas de oui clair, pas d’appel.
Cette loi, portée entre autres par le sénateur Pierre-Jean Verzelen, est décrite comme un tournant historique. Elle veut replacer le consentement au cœur des pratiques commerciales. Un changement bienvenu, mais encore entouré de flou.
Un cadre prometteur, mais encore flou
Comment ce fameux « oui » sera-t-il exprimé ? Un simple clic sur une case suffit-il ? Faudra-t-il un accord écrit ? À l’heure actuelle, rien n’est tranché. Les mois à venir devraient permettre d’affiner ces points pratiques, en laissant aussi le temps aux entreprises de s’adapter.
Autre règle intéressante : même les clients existants ne pourront plus être contactés à tout-va. Si vous avez signé un contrat avec une entreprise, elle ne pourra vous appeler que pour vous parler du produit ou service concerné, et non pour vous vendre autre chose. Fini donc l’appel de votre fournisseur d’électricité qui veut aussi vous vendre de l’isolation à un euro.
Des contrôles renforcés pour mieux faire respecter la loi
Côté application, l’État muscle son jeu. La DGCCRF, la CNIL et l’Arcep vont pouvoir partager leurs données pour suivre à la trace les fraudeurs. L’objectif ? Repérer plus vite les appels douteux et mieux sanctionner ceux qui contournent les règles.
La ministre du Commerce et des PME, Véronique Louwagie, a été claire : « L’État est pleinement mobilisé pour faire appliquer cette nouvelle interdiction et continuer de lutter contre les fraudeurs. »
Mais le téléphone risque de continuer à sonner…
Sur le papier, tout semble parfait. Dans les faits, la route reste longue. Des domaines comme la formation CPF ou la rénovation énergétique sont déjà interdits de démarchage, et pourtant… ces appels n’ont pas disparu. En 2023, 4,4 millions d’euros d’amendes ont été infligées, mais cela n’a concerné que 60 % des sources identifiées. Et les robots d’appel, souvent situés à l’étranger, sont toujours plus difficiles à tracer.
Eric Dadian, président de l’Association française de la relation client, alerte d’ailleurs sur les limites du modèle : « En Allemagne, une loi similaire est en place depuis des années… et les appels frauduleux existent toujours. » Le vrai problème ? Ceux qui ne respectaient déjà pas la loi actuelle ne se gêneront pas pour ignorer la prochaine.
Silence espéré, patience requise
Alors, faut-il croire à la fin du démarchage ? Pas tout de suite. La nouvelle loi est une avancée majeure sur le papier, mais sa réussite dépendra de sa mise en œuvre concrète, de la mobilisation des moyens de contrôle, et surtout, de notre capacité à traquer les fraudeurs bien au-delà de nos frontières.
En attendant 2026, les outils personnels restent vos meilleurs alliés : applications de blocage, filtres des opérateurs, signalement systématique… Et un soupçon de patience avant, peut-être, de raccrocher définitivement à ces appels non sollicités.