
Et si 2026 devenait l’année où les aides sociales cesseraient d’évoluer avec l’inflation ? C’est ce que laisse présager le gouvernement à travers son projet de budget, en évoquant une « année blanche » pour les prestations sociales. Mais attention, le terme n’a rien à voir avec celui utilisé durant la crise du Covid.
Une « année blanche » version austérité
Contrairement à l’année blanche des intermittents du spectacle en 2020, où l’État avait maintenu les revenus malgré l’absence totale d’activité, l’idée ici est tout autre. Il ne s’agit pas de garantir les aides sociales quel que soit le contexte économique, mais de ne plus les ajuster en fonction de l’inflation, comme le veut pourtant la loi. Résultat : si les prix augmentent mais que les allocations ne suivent pas, c’est du pouvoir d’achat en moins pour des millions de Français.
Les prestations concernées sont nombreuses : allocations familiales, RSA, prime d’activité, aides au logement, retraites… Elles sont habituellement réévaluées chaque année selon la hausse des prix. En gelant ces revalorisations, l’État réaliserait d’importantes économies.
Une économie à plusieurs milliards
Pour l’instant, la loi de finances pour 2026 table sur une inflation de 1,4%. Si cette estimation se confirme, le gel des seules pensions de retraite permettrait déjà d’économiser près de 4 milliards d’euros. Étendu à toutes les prestations, cela représenterait plusieurs milliards supplémentaires que le gouvernement ne débourserait pas.
Mais attention, ce chiffre dépendra fortement de l’évolution réelle de l’économie. En cas de hausse plus forte de l’inflation, le manque à gagner pour les bénéficiaires serait encore plus important – et les économies pour l’État encore plus substantielles.
Des précédents, mais jamais à cette échelle
Jamais un gel total de l’ensemble des prestations sociales n’a été mis en œuvre en France. En revanche, des revalorisations très inférieures à l’inflation ont déjà été pratiquées. En 2012, Nicolas Sarkozy avait limité la hausse des allocations familiales et des aides au logement à 1%, alors que l’inflation était bien plus forte. En 2014, François Hollande avait gelé les retraites. Et en 2019, le gouvernement Philippe n’avait revalorisé que de 0,3% l’ensemble des prestations sociales.
Ce qui se profile pour 2026 pourrait donc marquer un tournant inédit, sauf si certains dispositifs sont épargnés.
Vers une modulation selon les revenus ?
Pour l’instant, la ministre chargée de préparer le budget, Amélie de Montchalin, ne précise pas quelles aides seraient gelées. Mais certaines exceptions pourraient voir le jour, notamment pour les minima sociaux comme le RSA ou l’Allocation Adulte Handicapé, qui bénéficient aux personnes les plus vulnérables.
Le gouvernement pourrait aussi s’inspirer d’anciennes propositions : en 2011, Michel Barnier envisageait de geler uniquement les retraites les plus élevées. Une telle modulation permettrait de ménager les plus modestes, mais elle s’éloignerait de la logique d’une « année blanche » uniforme.
Un coup de balai fiscal à venir
Autre piste d’économies évoquée : la suppression de certaines niches fiscales. Aujourd’hui, près de 467 niches pèsent environ 80 milliards d’euros pour les finances publiques. Le gouvernement souhaite en supprimer une cinquantaine, mais sans donner pour l’instant de liste précise.
Une cible semble toutefois se dessiner : la fameuse niche des 10% de frais professionnels pour les retraités, souvent décriée, pourrait disparaître. Un choix politiquement risqué, puisqu’il touche une population électoralement sensible. Laurent Wauquiez a déjà annoncé son opposition farouche à cette mesure.
Une annonce qui prépare le terrain
Rien n’est encore acté, mais le ton est donné : le gouvernement cherche des marges de manœuvre budgétaires, quitte à écorner certaines protections sociales. La « sobriété budgétaire » de 2026 pourrait bien passer par les plus fragiles. Le débat promet d’être vif, à la fois au Parlement et dans l’opinion.