
Meta change de cap. Le géant américain des réseaux sociaux a annoncé qu’il allait désormais puiser dans les données publiques de ses utilisateurs européens pour nourrir ses modèles d’intelligence artificielle. Un revirement stratégique qui soulève de nombreuses questions sur la vie privée et le consentement.
Meta mise sur vos publications pour faire progresser son IA
C’est officiel : les contenus publics partagés sur Facebook et Instagram en Europe pourront être utilisés pour entraîner l’IA de Meta. Cela inclut vos légendes sous les photos, commentaires ou publications visibles par tous, ainsi que les questions que vous pourriez poser au chatbot Meta AI, lancé fin mars dans l’Union européenne.
En revanche, vos messages privés avec des proches ne seront pas concernés, tout comme les conversations sur WhatsApp, même si elles passent par Meta AI. Les comptes des moins de 18 ans resteront aussi en dehors du dispositif.
Concrètement, les utilisateurs recevront bientôt une notification leur expliquant ce changement, avec un lien pour refuser l’utilisation de leurs données. Une manière pour Meta de se conformer aux exigences du RGPD, tout en poursuivant le développement de ses modèles d’intelligence artificielle.
Une volte-face marquée pour Meta
Ce choix marque un tournant pour l’entreprise de Mark Zuckerberg. Lors du lancement de Meta AI en Europe, le groupe avait pourtant insisté : aucune donnée européenne ne serait utilisée pour entraîner ses algorithmes. Cette prudence s’expliquait par les fortes contraintes réglementaires européennes, qui avaient d’ailleurs retardé le déploiement de la technologie de plus d’un an sur le continent.
Mais depuis, la ligne a changé. Meta s’appuie désormais sur un avis publié en décembre par le Comité européen de la protection des données (CEPD). Celui-ci considère que l’“intérêt légitime” peut servir de fondement juridique pour utiliser certaines données personnelles dans le cadre du développement d’une IA.
Des plaintes toujours en cours dans 11 pays européens
Ce changement de stratégie ne passe pas inaperçu. L’organisation Noyb, spécialisée dans la défense de la vie privée en ligne et fondée par l’activiste autrichien Max Schrems, a déjà déposé des plaintes dans 11 pays européens contre les pratiques de Meta en matière de données.
L’an dernier, ces plaintes avaient conduit à la suspension temporaire du projet d’IA du groupe, précisément à cause de l’utilisation jugée illégale des données personnelles. Aujourd’hui, Meta semble vouloir reprendre la main, en avançant sur un terrain plus réglementairement sécurisé — mais toujours contesté.
Ce que vous pouvez faire si vous ne souhaitez pas participer
La bonne nouvelle, c’est que vous aurez la possibilité de vous opposer à cette collecte. Le formulaire de refus (opt-out) sera accessible via une notification ou depuis les paramètres de confidentialité. Encore faudra-t-il être informé, comprendre la démarche et penser à la faire à temps.
En attendant, cette décision relance le débat sur la frontière entre innovation technologique et respect de la vie privée, dans une Europe qui reste très vigilante sur la question. Meta, lui, semble déterminé à rattraper son retard face aux autres géants de l’IA — quitte à flirter une fois de plus avec les lignes rouges de la réglementation.