Le Sénat a validé une prolongation jusqu’au 31 décembre 2026 de l’utilisation élargie des titres-restaurant, permettant leur usage pour l’achat de denrées alimentaires non directement consommables. Cette mesure, adoptée définitivement, soulage les bénéficiaires tout en ravivant les tensions avec les restaurateurs. Le gouvernement promet une réforme pérenne dès cet été.
Une dérogation prolongée pour deux ans
Depuis l’été 2022, une dérogation exceptionnelle permet d’utiliser les titres-restaurant pour des produits tels que pâtes, viande ou farine. Initialement prévue pour durer un an, cette mesure a été prolongée à plusieurs reprises. Ce 14 janvier, le Sénat a adopté sans modification la proposition de loi transmise par l’Assemblée nationale, prolongeant cette dérogation jusqu’à fin 2026.
La mesure bénéficie à près de six millions de salariés qui peuvent ainsi utiliser leurs titres pour des achats alimentaires variés, au-delà des produits directement consommables comme les plats préparés. « L’urgence l’emporte sur le principe », a déclaré Marie-Do Aeschlimann, rapporteure (LR) de la commission des affaires sociales, saluant le pragmatisme de ses collègues face à une situation exceptionnelle.
Une réforme promise pour éviter une pérennisation implicite
Bien que cette prolongation offre une solution temporaire, elle n’a pas vocation à devenir permanente, selon les sénateurs et le gouvernement. Véronique Louwagie, ministre chargée du Commerce, a fixé l’été 2025 comme échéance pour présenter les grandes lignes d’une réforme. « Ce report de deux ans est une date butoir, mais nous pouvons mettre en place un nouveau dispositif bien avant la fin de cette période », a-t-elle affirmé.
Les travaux de concertation reprendront dans les semaines à venir, avec pour objectif de concilier les attentes des employeurs, des restaurateurs et des émetteurs de titres-restaurant. Selon Xavier Iacovelli, sénateur Renaissance, une réforme équilibrée devra garantir un usage juste et durable des tickets restaurant.
Un usage élargi qui divise les acteurs
La prolongation de cette mesure temporaire suscite des critiques, notamment de la part des restaurateurs, qui dénoncent une perte de parts de marché. Selon la Commission nationale des titres-restaurant (CNTR), la part des titres utilisée dans la restauration est passée de 46 % à 40 % en deux ans. « Cette extension impacte directement notre secteur déjà fragilisé », déplore un représentant du secteur.
À gauche, les critiques pointent l’absence de solutions structurelles pour le pouvoir d’achat. « Le chèque restaurant doit retrouver sa vocation originelle, mais dans un cadre rénové », a estimé Annie Le Houérou, sénatrice socialiste, appelant à des mesures pérennes pour soutenir les ménages face à la crise économique.
Une adoption soutenue mais non unanime
Le texte, adopté par 221 voix contre 117, a vu un soutien majoritaire des groupes de droite et du centre, tandis que la gauche a voté en faveur par pragmatisme, bien qu’appelant à des réformes plus ambitieuses. Les écologistes et communistes ont souligné la nécessité de renforcer les dispositifs de soutien au pouvoir d’achat, tout en prévenant contre une banalisation de cette dérogation.
En attendant la réforme, que change cette mesure pour les salariés ?
Les bénéficiaires des titres-restaurant pourront continuer à les utiliser dans les supermarchés et épiceries pour des produits variés. Les systèmes informatiques n’ayant pas été mis à jour depuis le 1er janvier, cette mesure garantit une continuité pour les utilisateurs.
Avec cette prolongation, les tickets restaurant restent un outil clé pour améliorer le pouvoir d’achat des salariés, mais la nécessité d’une réforme durable est plus pressante que jamais. Le gouvernement est attendu au tournant pour dessiner l’avenir de ce dispositif emblématique.